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Hanotaux, Gabriel, 1853-1944 / Histoire illustrée de la guerre de 1914
Tome, 1 (1915)
Chapitre VII/ Les puissances européennes: l'Autriche-Hongrie, pp. 153-[171]
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HISIO IR R.1 LLUSTRE E I1) J L¿A GU R 1; 1D DE 1 91 4 le cabinet Hohenwart, soutenu par l'empe- reur, se montra disposÈ ý reconnaÓtre ý la BohÍme une constitution fÈdÈrale, sanctionnÈe par un serment de l'empereur, lors de son cou- ronnement ý Prague comme roi de BohÍme. C'est ÈtÈ, peut-Ítre, le point de dÈpart d'un fÈdÈralisme ý trois tÍtes. Mais les ÈlÈments magyar et allemand se coalisËrent contre une telle politique et Hohenwart disparut. En i896, le comte Badeni, grand seigneur polonais, appelÈ aux affaires, ý la chute du ministËre Taaffe, travailla de nouveau ý for- tifier la position des Slaves dans l'empire et publia les fameuses ordonnances pour Ètablir l'ÈgalitÈ de la langue tchËque et de la langue allemande. Badeni avait cru pouvoir compter sur l'appui de FranÁois-Joseph qui, une fois encore, parais- sait assez disposÈ ý se libÈrer de l'exigence ma- gyare pour chercher son point d'appui sur l'ensemble de ses sujets. Mais, ni Badeni, ni l'empereur FranÁois-Joseph ne purent rÈsister au formidable courant du Los von Roml, dirigÈ au moins autant contre les Slaves que contre l'ÈlÈment ultramontain, et la tentative Èchoua par la chute d'un des hommes les plus distinguÈs qu'ait connus l'empire austro- hongrois. Sauf ces courtes interruptions, l'ÈlÈment hongrois, dirigÈ par les Andrassy, les Koloman Tisza s'entendit avec l'ÈlÈment allemand, pen- dant la longue pÈriode qui s'Ècoule de la guerre de i870 ý la guerre actuelle. Bismarck encou- ragea et exploita le chauvinisme particulariste hongrois et on a pu dire, avec raison, que la Hongrie gouvernait l'Autriche par l'intermÈ- diaire de la dynastie ª. C'est ý peine si l'ÈlÈ- ment slave parvenait ý se glisser dans les conseils de la couronne et ý s'y maintenir par des services prÈcieux et infiniment dÈ- vouÈs comme ceux du sage Goluchowski. La question slave Ètait en sommeil. Ces olopulations s'accroissaient, s'eniriclhissaienlt, prenaient conscience de leur nombre et de leur puissance. Peuples hier encore dÈdaignÈs, ils prenaient, au dedans et au dehors, le caractËre de nationalitÈs fortes qu'il n'Ètait pas possible de tenir dans l'oubli ou de traiter par le mÈpris. Vers la fin du XIXe siËcle, un dÈputÈ germano- phile, effrayÈ de leurs progrËs, posait la question en ces termes: Il ne s'agit plus de palliatifs, il ne s'agit plus des ordonnances sur les langues ni d'un accord ý Ètablir entre Allemands et TchËques, accord impossible ý cause de la dif- fÈrence des idÈes. Il s'agit de savoir si l'Au- triche sera une grande puissance politique et sociale, sous une direction allemande, ou un Stat fÈdÈral, tchËque-polonais-allemand, qui fera une politique slavo-clÈricale et se tournera Pilus tard contre l'alliance avec l'empire allemand- protestant. ) Ce fut la premiËre de ces deux politiques qui prÈvalut. La Hongrie en profita pour dÈve- lopper son intransigeance dans les affaires communes. De i903 ý i906, il semblait, qu'en raison de ces exigences, le gouvernement intÈrieur devenait impossible. En Autriche, les institutions parlementaires ne fonctionnaient plus ; en Hongrie, le parle- ment se montrait soupÁonneux ý l'Ègard de tout ce qui pouvait concourir ý l'accrois- sement de l'autoritÈ impÈriale et refusait mÍme les crÈdits nÈcessaires au dÈveloppe- ment de l'armÈe. Des tiraillements sans nombre disloquaient ý petits coups une monarchie qui Ètait loin d'Ítre la plus solide de l'Europe. L'idÈe s'accrÈdita peu ý peu que seule, une poli- tique extÈrieure hardie pourrait rendre du prestige ý la couronne et refouler les revendi- cations croissantes des diverses nationalitÈs. Les pangermanistes du dehors agissaient avec une audace inconcevable. La gradation est la suivante: d'abord, on demande simple- ment le rappel des ordonnances de Badeni, puis, on refuse toute entente avec les Slaves de la couronne; enfin, on rÈclame, sans ambage, la rÈunion des pays cis-leithaniens au Zollverein allemand(: j Je tiens une rÈconciliation avec les Slaves pour un effort inutile, Ècrit le brutal leader (le cette politique intransigeante, Schoe- nerer ; il s'agit simplement (le savoir si notre suprÈmatie ou celle (les Slaves s'implantera
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