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Hanotaux, Gabriel, 1853-1944 / Histoire illustrée de la guerre de 1914
Tome 1 (1915)
Chapitre II: La politique de l'Angleterre: la triple entente, pp. 27-[41]
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HISTOIRE ILLUSTRSE DE LA GUERRE DE I9I4 seigner sur l'Ètat exact des forces anglaises et boers, et, sur ces bases, je traÁai un plan de campagne qui me parut le meilleur et le soumis aux observations de mon Ètat- major gÈnÈral. Je le dÈpÍchai en Angleterre. CoÔncidence curieuse: le plan par moi Ètabli suivait ý peu prËs les mÍmes lignes que celui dont lord Roberts assura l'exÈcution... ª Donc, cet empereur, dont les facultÈs stratÈ- giques n'avaient pas encore ÈtÈ ÈprouvÈes, les employa, pour la premiËre fois, ý diriger l'offensive anglaise contre les armÈes du prÈsi- dent Kr~ger et, en somme, c'est ý lui que les Anglais devraient la victoire. Il est inutile d'ajouter que, d'aprËs les dÈclarations offi- cielles de lord Haldane, ministre de la Guerre anglais, on ne trouva, dans les archives du War-Office, aucun plan de campagne ÈlaborÈ en Allemagne. L'incident, ds ý l'intempÈrance de lan- gage et ý la versatilitÈ de l'empereur Guillaume, eut, sur les relations entre l'Alle- magne et l'Angleterre, les suites les plus f'cheuses : Les diplomates et les historiens allemands auraient besoin de mÈditer le pro- verbe franÁais Qui veut trop prouver ne prouve rien. ª) AV»NEMENT Quand Edouard VII D'SDOUARD VI] monta sur le trÙne (22 janvier i90i), il avait conÁu le projet rÈflÈchi d'un rapprochement avec la France. Longtemps avant son avËnement, il avait donnÈ des preuves remarquables de cette dis- position d'esprit, en dÈmÍlant le pÈril bismar- ckien. Un de ses familiers Ècrivait dËs 1NY7(N: L e prince de Galles, c'est l'Angleterre jeune, courageuse, altiËre, remplaÁant l'Angleterre caduque, hÈsitante, morbide. Le brillant hÈri- tier du trÙne a encore d'autres idÈes en tÍte et qui sont marquÈes au coin d'une grande mÈfiance ý l'Ègard de la politique de M. de Bismarck... ª On peut dire que ce sont ces idÈes en germe (lui se sont Èpanouies quand le prince de (,alles ª (levint le roi Edouard VII, et elles ont dÈcidÈ du rÙle actuel de l'Angleterre. Elles ne pouvaient, cependant, avoir un effet rÈel sur la direction de la politique bri- tannique que si le roi Ètait d'accord avec son peuple. Le gouvernement anglais est, surtout en matiËres d'affaires ÈtrangËres, un gouver- nement d'opinion: quand l'opinion change, le ministËre est toujours, d'une faÁon on de l'autre, obligÈ de la suivre. Or, le public anglais commenÁait a se sentir portÈ obscurÈment vers des sentiments moins favorables ý l'Allemagne. L'attitude ambiguÎ de cette puissance pendant la guerre du Transvaal contribua ý cette Èvolution : mais les causes Ètaient plus profondes. Peu ý peu, l'Allemagne se manifestait puis- samment expansionniste et il n'Ètait pas pos- sible qu'elle ne se trouv't pas, un jour ou l'autre, sur le chemin de l'Angleterre. Ainsi se dÈgageait un des ÈlÈments principaux du conflit qui devait, un jour, diviser l'Europe: l'ÈlÈment Èconomique. Ce sont les intÈrÍts Èconomiques et com- merciaux (lui mirent, d'abord, l'Angleterre en Èveil. La campagne du ª Made in Germany ouverte en I897, par une brochure d'Edwin Williams, dÈpeignit le progrËs de l'exportation allemande sur tous les marchÈs du monde, mÍme sur le marchÈ mÈtropolitain anglais, et, par contre, un certain flÈchissement de la production et du commerce anglais. Stanley, traduisant les inquiÈtudes dans un discours qui eut un grand retentissement, disait au Lambeth Conservative Club: En Australie, nous avons reculÈ de 20 0/o, tandis que les Allemands ont avancÈ de plus de 400 O/O. I)ans la Nouvelle-ZÈlande, notre perte est de 25 o/o; la hausse allemande de i,ooo o/o. Dans la colonie du Cap, nos affaires ont progressÈ, il est vrai, de I25 o/o dans la derniËre pÈriode dÈcennale, mais le commerce allemand a dÈcuplÈ. Au Canada mÍme, nous sommes en baisse de II o/o, les Allemands sont en hausse
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