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Hanotaux, Gabriel, 1853-1944 / Histoire illustrée de la guerre de 1914
Tome 15 (1923)
Chapitre LXVII: La grande crise de l'hiver 1916-1917, pp. 93-146
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HISTOIRE ILLUSTRSE DE LA GUERRE DE I9I4 matique et Èconomique ª. Au mÍme moment, le gÈnÈral Joffre crÈait, au G. Q. G., un rouage Èconomique sous la direction du capitaine FranÁois-Marsal. Cette initiative, de caractËre exclusivement militaire, concordait avec les vues du Gou- vernement. GalliÈni, ministre de la Guerre, le prenait en main dËs janvier i9i6; elle trou- vait, dans les autres administrations, un terrain bien prÈparÈ. DËs le dÈbut de la guerre, on avait songÈ ý organiser la lutte contre la contrebande des- tinÈe ý favoriser l'approvisionnement de l'en- nemi: l'amiral Moreau Ètait venu trouver M. JeanGost, sous-directeur au ministËre des Affaires ÈtrangËres, et lui avait suggÈrÈ de chercher, ý ce sujet, les bases d'un premier ac- cord Èconomique, -naval et militaire, avec l'Angleterre: c'Ètait un premier pas dans le sens de l'organisation interalliÈe du blocus. La nÈgociation fut immÈdiatement engagÈe avec Londres, et l'accord se fit sur les bases de la convention de Londres de i919, modifiÈe en deux points extrÍmement importants: I1 La destination hostile de la contrebande relative est prÈsumÈe si les marchandises sont consignÈes ý ou pour le compte d'un agent des Etats ennemis, d'un commerÁant ou de toute autre personne agissantsous le contrÙle d'un Etat ennemi; 20 La thÈorie du voyage continu est appli- cable ý la contrebande relative; les marchan- dises sont sujettes ý confiscation s'il est Ètabli qu'elles sont destinÈes ý l'Etat ennemi ou aux autoritÈs d'un Etat ennemi, quel que soit le port de destination du navire ou celui o~ les marchandises doivent Ítre dÈbarquÈes. C'Ètait dÈjý le principe du blocus ý dis- tance ª qui se faisait jour, et dÈjý aussi se po- sait la grave question des neutres, intermÈ- diaires de la contrebande. L'Etat-Major alle- mand avait compris l'avantage qu'il pouvait tirer, ý ce point de vue, de la situation des neutres qui entouraient l'Allemagne: SuËde, NorvËge, Danemark et surtout Hollande et Suisse. Ces deux derniers pays importËrent. ý un certain moment, jusqu'ý dix lois plus de denrÈes qu'il ne leur Ètait nÈcessaire et ra- vitaillaient ainsi l'Allemagne ª (I). Telle Ètait la principale raison pour laquelle l'Etat-Major allemand avait, de propos dÈlibÈrÈ, mÈnagÈ la neutralitÈ de la Hollande. DËs octobre I9I4, la question de la contre- bande par les neutres apparut comme devant Ítre dÈcisive sur l'issue mÍme de la guerre. On fit savoir, dËs lors, aux pays intermÈdiaires de la contrebande, qu'ils avaient ý choisir ou voir abolir leur commerce maritime, ou consentir ý le limiter selon leurs besoins avÈrÈs et raisonnables. Les commerÁants hollandais furent les premiers ý comprendre que c'Ètait leur existence commerciale et peut-Ítre leur indÈpendance politique qui Ètait* en jeu. Ils proposËrent d'eux-mÍmes, d'organiser un grand trust, Netherland Oversea Trust a, qui assumerait la responsabilitÈ de ce que l'on devait appeler bientÙt le contingentement ª. La confiance s'Ètablit sur ces bases entre les organismes alliÈs et le trust et il en fut de mÍme avec celui qui, ý l'imitation du trust hollandais, s'Ètablit ultÈrieurement en Suisse. Cette politique fut un grand bienfait et une preuve de la sagesse rÈciproque des rÈgimes dÈmocratiques. La paix des esprits dans le monde dÈpendit sans doute de ces excellentes mesures concertÈes par le bon vouloir commun. Les principes Ètaient posÈs; l'Allemagne se trouvait sinon isolÈe, du moins Ètroitement surveillÈe et.contrÙlÈe : cependant des secours extÈrieurs lui parvenaient encore par mille fissures, quand elle commit soudain une faute inouÔe, dictÈe, comme toujours, par l'esprit de domination et d'orgueil. S'appuyant sur le fait que l'Angleterre avait pris ý t'che de reconstituer des passages sur la mer en draguant les champs de mines, le gouvernement allemand prÈtendit qu'il s'a- gissait d'un blocus des ports et des cÙtes neutres ; et, le 4 fÈvrier I9I5, il lanÁa une dÈcla- ration o~, ý titre de reprÈsailles, toutes les (I) P. BRUNEAU, loc. Cit., mars 1922, P. 221. 144
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